dimanche 15 octobre 2017

DIY numériseur à films vs Nikon D850

DIY Scanner version très très économe. photo Martin Benoit
Lorsque Nikon a présenté son dernier appareil, le Nikon D850, beaucoup de bruit s'est fait autour du phénomène qu'il le recommandait comme numériseur à pellicule à l'aide de l'adaptateur ES-2.

Cette solution de numériser des films à l'aide de caméras numériques a pris sa popularité lors de l'apparition du Canon 5D mkII qui se confrontait aux numériseurs de l'époque. Beaucoup concluaient que de numériser en macro du film à l'aide d'expositions multiples (HDR) à la magnification finale recherchée, atteignait une qualité de gradation et de définition supérieure à plusieurs numériseurs spécialisés.

Qu'en est-il de la solution du D850/ES-2? Premier fait à remarquer est que Nikon recommande l'utilisation d'un de leurs objectifs macro/micro qui se détaille autour de 700$ en plus du 200$ pour le ES-2... Nous ne sommes pas loin du prix d'un numériseur Epson Photo V800 à 6400ppi pour 1150$.

Nikon parle en termes de numérisation à 45,7MP et Epson et les numériseurs parlent en termes de résolution en ppi. 6400ppi c'est 6400 pixels au pouce et un 35mm mesure 24mmx36mm, soit 1po par 1,5po. Donc 6400px x 8600px = 55Mp. Tout ça est un calcul mathématique de combien de pixels peuvent théoriquement être générés par de telles numérisations.

Tous ceux qui sont familiers avec la numérisation de pellicules savent que les pixels ne sont pas tous nés égaux. Les appareils photo doivent faire du démosaïcage afin de générer les valeurs BVR d'un pixel donné, et ce très souvent au travers un filtre passe-bas (sorte de diffuseur) de sorte à éviter les confusions de couleurs propres au motif Bayer qu'utilisent les capteurs. D'autre part, la grande majorité des numériseurs à plat font appel à un capteur trilinéaire qui consiste en trois rangées de photosites spécialisés en la capture d'une couleur primaire. C'est le balayage qui permettra de successivement capturer individuellement pour chaque pixel de vraies valeurs BVR sans avoir recours au démosaïcage.

Le point faible de la grande majorité des numériseurs à plat est qu'ils utilisent des optiques de qualité discutable et ce toujours à la même magnification (distance film à numériser/capteur). Ils obtiennent les différentes résolutions grâce à l'intrapolation des pixels capturés ou simplement en s'abstenant de capturer certaines informations de certains pixels quand la résolution sélectionnée est un multiple inférieur à la résolution native du capteur. De plus, la grande majorité des numériseurs ont une faible plage de luminosité afin de s'adapter aux diverses plages de densité que peuvent présenter une diapositive sous-ex ou encore un négatif sur-ex ou surdéveloppé. Traverser des densités élevées au-dessus de 2,5 devient rapidement problématique pour les numériseurs. Il y a des exceptions chez certains numériseurs comme les Nikon en variant la puissance de la source lumineuse ou encore chez les numériseurs à tambour. On parle de budget complètement différent dans ces derniers cas.

Un grand avantage de numériser à l'aide d'un bon appareil photo HDSLR est d'avoir un contrôle quasi total sur l'exposition et de la plage de densité ainsi que la gradation que l'on obtiendra. Si l’on désire une résolution supérieure, on s'approche du négatif et on le numérise en parties que l'on reconstruit ensuite dans Photoshop. Si on désire traverser un film trop dense, on augmente le temps d'exposition ou la puissance de la source lumineuse. On désire une grande plage dynamique, on effectue diverses expositions que l'on recombine (hdr). Théoriquement, c'est le paradis et le grand contrôle. Dans les faits, l'exercice est plutôt laborieux si vous voulez des résultats précis. Par contre si vous pouvez vous contentez de résultats aussi bons que ce que votre caméra produit lors d'une photo de paysage, vous gagnez en vitesse. C'est souvent la solution la plus rapide pour numériser une très grande collection de diapositives. Un petit banc de repro et click, click, on passe d'une diapo à l'autre, pas d'aperçu de numérisation et le tour est joué beaucoup plus rapidement qu'un numériseur à plat.

Dans le but de rassurer mes étudiants, qui croient souvent qu'il n'y a plus de vie après le passage au département, car ils n'auront plus accès à notre vaste palette d'outils, je leur propose de se fabriquer un numériseur à film pour 27,44$ à partir d'éléments que l'on trouve au Dolorama et sur Amazon. Une vieille boîte de Kleenex, du papier ciré, une ampoule d.e.l., des bagues rallonges macro, un trépied inversé, un porte-négatif en bristol et le tour est joué. Il vous reste à être méthodique et méticuleux. Évidemment, ce dispositif peut-être amélioré à plusieurs égards, mais l'idée est de rester très accessible. Je dois vous avouer que je n'ai eu aucun succès avec les étudiants qui regardent cet assemblage plutôt comme un délire du prof. qu'un outil leur permettant de faire de l'argentique sans trop se vider le porte-feuille...

Ayant eu à numériser beaucoup de négatifs et diapositives à travers les années, j'ai utilisé toutes les techniques possibles allant de la boîte de Kleenex à 27$ au numériseur à tambour à 70k$ plus. Je trouve l'approche de Nikon très simple et relativement bon marché. Il faut par contre fermer le diaphragme au moins à f11 de sorte à compenser la courbure de champs des objectifs normaux. Sinon, il faut s'équiper d'un objectif micro (pas bon marché) afin de s'assurer que les coins seront en foyer. Les objectifs de courtes focales ne performent pas bien à de telles ouvertures. Nous entrons dans les problèmes de diffractions et autres. Si vous possédez déjà un objectif micro récent ou plus vieux, c'est une bonne solution pour usage occasionnel. Les objectifs Micro-Nikkor 55mm f3,5 sont superbes et faciles à trouver dans l'usagé.

N'oubliez pas que le ES-2 est d'une épaisseur prédéterminée et que seulement une magnification sera atteignable avec un objectif donné. Donc, vous ne pourrez pas numériser qu'une portion de film.