vendredi 27 février 2015

Vincent Laforet prédicateur/visionnaire ou prophète de malheur?

Le photographe-blogueur Vincent Laforet a publié ses prédictions relatives au futur de la profession de photographe dans un récent billet sur son blogue.
iPhone et Instagram quelque part dans le sud des USA. photo Martin Benoit

À la lecture de ce billet, on en arrive à conclure qu'Apple est la compagnie phare en photographie, que le métier de photographe professionnel, tel qu'on le connait, est en voie d'extinction et que la recherche et développement en matière de matériel photo haut de gamme pour les pros est un exercice qui intéresse de moins en moins de compagnies et d'utilisateurs.

Ces lugubres prédictions pour le milieu professionnel, se concluent par: adapte ou meurt!
Vincent valide ses déclarations par des analyses financières et des observations pertinentes.
En tant qu'enseignant dans un programme de photographie professionnelle, je ne peu qu'être interpellé par de telles déclarations.

Il est certain que les téléphones sont des gros joueurs dans la façon dont la société aborde la photographie et que peut-être pas suffisamment de professionnels leurs donnent leur juste crédit.

Pour ajouter aux statistiques de Vincent, j'ajouterai que selon les données de l'agence Reuters, concernant les meilleurs réglages de leurs photos de 2012, on peut arriver à la conclusion que plus de 50 % des photographies ont été prises autour de l'équivalent d'une 29 mm sur un plein capteur, à 1/400 f2,8 et 400ISO sur un appareil d'environ 20 MP. Les téléphones peuvent faire ça ou pourront faire ça bientôt. Ce que ça démontre, c'est que le matériel photo extraordinaire ce n'est pas pour la majorité des situations. Reuters ne représente pas toute la variété des secteurs photo, mais en tant qu'agence internationale ils ont à couvrir de la mode, au sport à l'actualité, etc.

Ce qui fait une bonne photo est heureusement ou malheureusement pas l'appareil, mais le photographe de plus en plus. L'appareil devenant de plus en plus accessible, ce qui nous distingue est de plus en plus le regard. Ce regard ne vient pas dans la boîte de la Canon 5D mkIII de chez Lozeau...

Par contre, il ne vient pas automatiquement avec votre statut d'entreprise et votre numéro de taxe ou votre système de facturation.

Pourquoi les « demandeurs de photographies » continueront-ils à faire appel aux pros dans le futur et pourquoi paieront-ils des gros sous pour ce service? Vincent répond partiellement à cette question en insinuant des changements de paradigmes dans la perception de ce qu'est une bonne photo.

J'entends souvent ce commentaire que les clients n'apprécient plus la qualité comme ils l'appréciaient il y a 20 ans. Peut-être ne nous sommes-nous pas adaptés à ce qu'est devenue la notion de qualité photographique? Oublions la résolution, l'étendue dynamique, la gradation, mais pensons rapidité de la livraison et de la distribution. La connectivité dans notre système de diffusion d'images. La capacité d'organiser une équipe autour d'un projet, de mieux comprendre ce qui atteindra le public cible et comment leur parler. Nous ne sommes pas des agences de pub avec leurs cerveaux qui sont payés pour ce genre de réflexions, mais dans des secteurs plus simples comme la photographie scolaire, le mariage, le catalogue, l'architecture, le corporatif et autres, il y a place à la réflexion et l'adaptation aux réalités de la génération C qui sont les nouveaux joueurs de notre société.

J'enseigne à cette génération depuis une décennie et je dois reconnaître que les efforts cérébraux à bien les comprendre sont plus exigeants que de bien comprendre la dernière version de Photoshop CC...

Sans comprendre ce qu'est cette génération qui sont et seront nos futurs employeurs et la future « compétition », les chances d'encore manquer le bateau sont grandes.

Aucun commentaire: