lundi 19 décembre 2016

Le paradoxe du cryptage en photographie

Un regroupement de photographes demandent aux grands fabricants de caméra d'inclure un protocole
Qui veut quoi?. photo Martin Benoit
de cryptage à même leurs appareils afin de les protéger contre des abus de diverses forces.

La problématique de cette demande, en plus d'être un problème technologique, tient au fait que si vous avez des fichiers encroûtés, qu'avez-vous à cacher?

On peut philosopher longtemps sur le droit à la vie privée et la protection des sources, mais reste que pour un "abuseur" de cesdits droits, le simple fait d'avoir de tels fichiers sur son appareil peut sembler suspect au point de vous faire "cracher" la clé de ce cryptage. Qui peut résister à une telle procédure et qui veut faire face à de telles procédures?

Oui, dans certains cas "démocratiques" les protagonistes auront à fournir un mandat valable d'investigation et ce cryptage pourra être suffisant afin de se protéger et de protéger ses sources, mais il ne faut pas aller très loin pour constater que même dans notre belle et grande ville moderne et démocratique, l’obtention de mandats afin de "fouiller" dans la vie de journalistes ne semble pas si difficile à obtenir...

Sans aller trop loin, que peut-on faire actuellement afin de se protéger? Une vieille méthode consiste à effacer la ou les photos problématiques à l'aide de la commande "effacer" de l'appareil et d'arrêter de faire de la prise de vue avec cette carte. Insérer une nouvelle carte et poursuivre son travail. Une fois dans un environnement plus "sécure" on utilise un logiciel de récupération de photos effacées et l’on retrouve nos images. Ça présente ses difficultés, mais c'est moins suspect que du cryptage. C'est une routine qu'il faut pratiquer. Une fois les fichiers sensibles sur son ordi, un logiciel comme Truecrypt peut crypter de façon inoffensive nos fichiers. De plus, Truecrypt n'a pas a résider sur notre ordi comme tel, mais peut résider sur un média externe ou en ligne. Oui, ces logiciels de récupérations peuvent être utilisés par n'importe qui et oui, il existe des solutions informatiques pour pénétrer n'importe quel téléphone cellulaire sécurisé. On n'a qu'à voir la solution israélienne que le FBI aurait utilisée pour ouvrir le iPhone d'un terroriste.

Les bons logiciels de cryptage peuvent utiliser la stratégie du "déni plausible" qui induira en erreur la personne qui vous forcera à livrer la clé d'un fichier crypté, protégeant ainsi le vrai contenu.

Le Devoir publiait un article sur le fait que la génération montante ne se soucie pas de l'invasion du Big Brother dans leur quotidien et qu'ils acceptent bien le fait d'être constamment surveillés. De plus en plus, le fragile équilibre entre la sécurité de la nation versus le respect de la vie privée se verront en conflit. On n'a qu'à penser à la nouvelle loi que le Royaume-Uni vient de se voter afin de se donner presque tous les pouvoirs d'enquête. Nous ne sommes pas dans un régime totalitaire, c'est le Royaume-Uni, notre "mère patrie".

Le 11 septembre ainsi que la progression de la technologie permettent une capacité d'investigation jamais vue auparavant. C'est un gain pour l'investigateur qui le fait pour débusquer les abus du système, c'est un gain pour l'investigateur qui veut débusquer les investigateurs qui surveillent le système...

La vie privée existera quand tous les systèmes seront cryptés de façon inviolable et que ce sera devenu la norme, que vous manipuliez du matériel sensible ou non.

dimanche 4 décembre 2016

Brooks Institute ferme ses portes

prise de notes en 2016. photo Martin Benoit
Une très grande école de photographie professionnelle des États-Unis a fermé ses portes par manque d'étudiants et suite aux nouvelles politiques américaines d'aviser les futurs étudiants des dettes auxquelles ils auront à face suite à leurs études.

Cette politique s'applique aux écoles à buts lucratifs, ce qui est le cas d'une grande proportion des écoles américaines.

Pourquoi un tel endettement? Car les frais de scolarité de ces institutions sont trop élevés? Car les débouchés en photographie artistique sont moindres que ce que les cohortes fournissent en nouveaux artistes? Car la demande en photographe est moins élevée que la quantité de photographes disponibles?

Doit-on former la quantité de photographes que l'industrie requiert ou doit-on offrir à tout un chacun l'opportunité de se former dans le domaine de son choix au risque qu'il se retrouve sans emploi ou qu'il sabote les prix de l'industrie? C'est un débat de société qui ne plait pas toujours à l'industrie et que le ministère de l'Éducation résout assez simplement: "C'est toujours mieux d'avoir un individu formé dans un domaine quelconque que d'avoir un décrocheur". N'importe quelle formation favorise la mobilité par opposition à pas de formation.

On m'a fourni récemment les archives de la création de notre programme de photographie autour des années 1966. Nous sommes une création de la CMPQ (Corporation des Maîtres Photographes du Québec) qui cherchait une formation qui permettrait d'uniformiser les compétences des photographes ayant, à l'époque des formations diverses ou simplement pas de formation. Lorsque le ministère ouvrit le programme en 1968 suite au projet de formation de la CMPQ, nous avons eu 200 demandes d'admission. Un questionnaire avait été posé aux aspirants et seulement un candidat voulait devenir laborantin. La CMPQ s'est alors retrouvée avec une patate chaude dans les mains créant tant de compétition parmi les leurs. "Heureusement », la première cohorte n'a produit que 12 photographes.

Cette question ne se pose plus vraiment aujourd'hui, car le "secret professionnel" que pouvait fournir une formation est disponible partout sur Internet et presque tout peut s'apprendre via Internet. Oui, une relation humaine et un programme bien structuré permettront à l'étudiant d'aller plus loin et de l'encadrer, mais admettons que ce n'est plus aussi essentiel que ce l'était.

Considérant la vitesse à laquelle la technologie évolue, la formation continue est de plus en plus importante, tant pour les photographes que pour les enseignants. Comment être un enseignant pertinent sans devenir un imposteur? C'est le défi que doit relever l'enseignant moderne au Québec où les conventions collectives interdisent le double emploi qui pourrait favoriser une présence constante sur le marché.  L'enseignement de la photographie en 2016 requiert d'être un guide qui saura aider l'étudiant à découvrir ses forces et faiblesses et à l'orienter vers des marchés plausibles pour lui ou elle.

Un défi valorisant, mais de plus en plus exigeant ayant à négocier, entre autres, avec la présence des téléphones cellulaires et autres sources de distractions dans ce monde de plus en plus rapide où les résultats sont attendus de plus en plus rapidement.