mercredi 16 février 2011

Le syndrome FOMO chez les photographes

Avant les années 2000, la vie pouvait être assez simple pour certains photographes.
Tu achetais un gros kodak, un gros kit de flash, tu t’abonnais à Ray Gun, PDN et Communication Art, tu avais une personnalité agréable et un sens des affaires pas trop mauvais et tu étais en affaire.

C’est une simplification à outrance, mais pour certains, c’était la vie et ça fonctionnait.

Depuis l’an 2000, la numérisation de la photographie a changé la donne et a laissé certains anxieux dans la peur de manquer le bateau ou un bateau. On a tous connu un photographe antinumérique qui a payé cher sa négation des changements et l’on espère ne pas faire partie de la prochaine cohorte qui n’aperçoit pas le train qui passe.

Cette anxiété ancrée, typique des années 2010, se nomme F.O.M.O. (Fear Of Missing Out) et est un syndrome répandu chez les photographes en affaire. Que ce soit, dois-je offrir des services vidéos à mes clients à faut-il que je sois sur Twitter, ou encore, est-ce que je consulte les bons blogues ou forums, la peur de manquer quelque chose d’important s’installe. C’est aussi une question de l’air du temps. Mes étudiants, qui ne sont pas en affaires, ne peuvent s’empêcher de texter et de consulter Facebook de peur de manquer quelque chose.

Cette anxiété à un prix en terme d’affaires. Dans quelle mesure toute cette énergie dépensée à sonder la planète et à se broadcaster (égocast) se traduit-elle vers des revenus ou plus simplement vers une amélioration de notre qualité de vie?

Après s’être numérisés, plusieurs ont cru temporairement que le gros de la vague était passé et que des révolutions il n’y en aurait pas avant un bon moment et que l’on pouvait respirer un peu. Qu’en est-il vraiment? Peut-on se payer le luxe de ne pas être au faîte des tendances photo, de ne pas connaître la dernière technique de HDR ou la petite passe pour augmenter sa visibilité sur le web? Ou sera-t-on la prochaine victime de sa propre inertie? La mondialisation se met de la partie avec la facilité d’acheter de la photo de partout sur la planète à la portée d’un clic, de faire faire son Photoshop™ en Inde pour 1 $ la photo. Dans ce contexte, qui peut sembler hyper compétitif, peut-on se permettre de relaxer un moment sans risquer d’y laisser sa peau?

Internet et l’informatisation ont changé la vitesse de croissance des technologies et suivre cette progression est une profession en soi. Internet et ses conséquences ne ralentiront pas et l’évolution technologique de la photographie en est qu'à son aube. Les progrès à venir sont multiples et profonds. Il ne reste qu’un choix à faire : quels seront mes deuils et quelles en seront les conséquences?

Gérer une entreprise, c’est aussi gérer ses deuils. Bien gérer ses deuils assure le succès de l’entreprise et de l’individu.

C’était ma petite pensée du jour étant, moi aussi, affecté du syndrome.
photo Martin Benoit

1 commentaire:

MH Desrosiers a dit...

Excellente synthèse. Au tournant des années 2000, j'ai choisi de mettre mes $$$ sur mon cerveau plutôt que sur un appareil numérique en me disant que mon cerveau était plus facile et moins cher à mettre à jour. Je suis donc retournée sur les bancs d'école. Avec le recul, je me rends compte que toutes les professions sont touchées par la problématique du FOMO et que je n'ai fait que retarder la réflexion (et choisi des outils de travail moins chers, mais ça c'est une autre histoire!).

J'aime bien l'ouverture qui termine ta réflexion. En affaires, il est nocif de vouloir «être tout pour tout le monde». Les meilleurs stratèges de tous les domaines se distinguent par leur talent à distinguer l'essentiel de l'accessoire, et à identifier la niche à occuper. Dans une époque caractérisée par la surcharge d'information, c'est un talent qui est plus précieux que jamais...