Suite aux billets sur le thème des salaires, Patrick, un salarié d'un grand quotidien montréalais, m'a fait parvenir les commentaires suivants, merci:
Allo Martin,
Dans ton post concernant les salaires des photographes, il n'y avait aucun discernement entre un photographe "travailleur autonome" (ou, au sens de la Loi sur le Revenu: "personne exploitant une entreprise individuelle") et un photographe "salarié". Ces 2 termes sont essentiels à différencier parce que c'est sur cette dualité que le Ministère du Revenu nous catégorise. Et la différence entre une "personne exploitant une entreprise individuelle" et un "revenu de salaire" est importante, chacune avec ses inconvénients et avantages. Autrement dit, c'est une fois par année, lorsqu'on fait nos impôts, que le bilan annuel de notre condition se révèle à nous EN CHIFFRES. Pour ce qui est de notre bonheur personnel vis-à-vis notre SALAIRE, cela dépend de notre rapport individuel avec l'argent, de nos valeurs individuelle. C'est souvent parce que le photographe n'a pas le choix qu'il est ou reste travailleur autonome. D'autres préfèrent être pris en main par un employeur "pourvoyeur". D'autres, comme moi, sont parfois nostalgiques du temps où on était "libre"... La vie nous mène où on le veut bien, j'imagine...
J'ai roulé 8 ans à mon compte avant d'obtenir ma permanence à La Presse. Voici ce que je retiens de ma vie de TRAVAILLEUR AUTONOME.
Les AVANTAGES d'être "travailleur autonome"
-Gérer son propre HORAIRE. (prendre les weekends quand on veut , les semaines, partir 1 mois, 2 mois pour un projet... Se lever à midi...)
-Les DÉDUCTIONS permises sur le rapport d'impot : équipements à 100%, repas au resto 50%, fraction du loyer (ou intérêts d'hypothèque) correspondant à la partie bureau/entreposage. L'Hydro, l'internet, le téléphone, le cellulaire... Le véhicule (et son essence, les assurances, les pneus, le windshield-washer!! Etc) jusqu'à 100% si c'est justifié.
-La LIBERTÉ de choisir pour qui on travaille, choisir nos clients, ou du moins, dans quel champ de la photographie on veut travailler (STUDIO, CORPO, MARIAGE,REPORTAGE...).
Y'a aussi quelques INCONVÉNIENTS
-L'INCERTITUDE de trouver du boulot. C'est pour ça qu'il faut au moins se trouver 2 ou 3 bons clients qui payent le loyer, pi après c'est du bonus. Les premières années sont difficiles.
-CONSERVER les clients. C'est une tâche sous-estimée, la compétition est féroce.
-Un mélange D'AMBITION et de nécessité de MANGER qui nous pousse à avancer. Pas toujours sain comme mélange...
-beaucoup de GESTION: gérer l'achat d'équipement, les bris d'équipement, les achats, le budget, les téléphones, les clients, les D.A. les locations de matériel, le studio, livrer la marchandise, graver des DVD à 3h du matin, le char qui est pogné dans le banc de neige quand t'as un groupe de 12 qui t'attend...
-L'ARGENT, Où trouver tous ces dineros pour acheter le dernier D3 ?? Yé tu beau le MacBook Air. Quoi? 2000 piasses même pas de DVD?
-pas vraiment d'AVANTAGES SOCIAUX ni RETRAITE.
-GARDER UNE DISCIPLINE, ce qui n'est pas donné à tous.
MA VIE MAINTENANT, je suis permanent et salarié à La Presse depuis mai 2006 Les AVANTAGES
-Semaine de 4 jours, weekend de 3 jours, avec un salaire confortable.
-convention collective presqu'en béton, qui balise très bien le travail qu'on a à faire et encâdre bien nos conditions de travail.
-4 semaines/an de vacances à l'embauche, 2 semaines se rajoutent aux 5 ans jusqu'à 8 semaines/an.
-Fond de retraite avantageux, assurances collectives diversifiées
-Équipement fourni. -Véhicule payé via un compte de dépenses non imposable.
-On manque pas de job évidemment, c'est même pas une question! Un stress de moins, pas besoin de chercher les clients...
-Plus que tout, j'adore la nature même de mon travail, toujours varié, opportunité de faire des reportages à l'étranger. La Presse est un journal qui valorise beaucoup la photographie. Tout projet soumis par un employé est considéré avec sérieux.
Les INCONVÉNIANTS -L'INCERTITUDE. Oui il y en a! Je travaille pour un journal imprimé. On connait tous la dégringolade des tirages à l'échelle mondiale. Où seront-nous, nous photo-journalistes à La Presse, dans 5 ans? 10 ans? Certainement avec une caméra vidéo dans les mains en train de shooter des capsules pour Cyberpresse...
-à la merci de L'EMPLOYEUR, c'est lui qui décide où tu vas, qu'est-ce que tu shootes. Souvent des jobs plattes.
-on a des COMPTES À RENDRE aux boss. Personne le dit mais c'est la réalité. On doit livrer la marchandise, sinon ce qui peut arriver c'est d'être tabletté même si on est protégé par le syndicat.
-Le stress de la COMPÉTITION. On veut être les meilleurs, ben on paye le prix en stress et en pression. C'est toujours go-go-go
-la LOURDEUR DU SYSTÈME. La Presse est une grosse entreprise, avec plusieurs intervenants. Produire une photo, à partir du moment où elle est commandée ou imaginée, jusqu'au résultat final dans le journal, va passer dans le tordeur d'au moins 10 personnes.
-La FRUSTRATION ultime: mettre de l'ardeur sur une assignation, et la photo ne passe pas faute d'espace, ou justement la photo a été écartée pour des raisons obscures lors du processus.
Voici l'équation mathématique représentant le salaire du photographe autonome: (Facturation totale envoyée aux clients)-(dépenses d'entreprises)-(TPS+TVQ)= (Salaire brut imposable) De ce montant, si on peut se le permettre, IL FAUT COTISER à une retraite. Hey la gang, on vas-tu traîner nos kodak jusqu'à 65 ans?? Voilà, c'était ma petite tranche de me vie de mes 10 dernières années... Alors, à mon compte ou salarié? Pain blanc ou pain brun? Lequel est le mieux? Je te dirai ça à ma retraite, dans... Euh...20 ans? J'peux tu encore cotiser à mes REER?
Salut Martin
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2 commentaires:
wow merci... super texte intéressant pour nous les jeunes ;)
véronique
Merci! Super interessant!
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